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JUI 22

En bord de mère

L'enfance est le sol sur lequel nous marchons toute notre vie et, bien davantage encore, les tous premiers instants en bord de mère. Oui, là où l'on apprend à être en vie, à être avec l'autre et contre l'autre. Quels que soient l'art et la manière de cet autre-là.

Et c'est forcément tout un monde quand cette part-là se dérobe pour de bon, quand cet autre primordial en vient à partir à jamais. 

C'est le récit de cette traversée ultime, bord à bord, « à l'heure des mamans », qu'Eva entreprend d'écrire dans « La bordée ». À sa manière. Et côté passager.

Eva avait déjà parlé dans « L'art du lien », son premier opus, de cet art majeur de l'accordage. Ça m'avait marqué tellement c'était hors du commun cette façon de dire les nouages, les ratages, les plis, les trous aussi, tout ce qu'on embarque, qu'on incorpore dans nos manières de vivre et dans nos histoires d'amour. À l'insu et à jamais.
 
Et La bordée c'est le moment à l'exact endroit de tout ça et à l'envers aussi. À rebours ou en miroir, je veux dire. Indécidable. Bouleversant.
Surtout si ça passe à cet instant où le monde tout autour, avec un virus encore inconnu aussi, commence à prendre peur et à cafouiller avec ses gouvernants qui tentent d'arrêter la vie devant...
 
« Border en mer revient à tendre la voile 
au plus près du bordé du bateau, sa coque.
Pour prendre le vent. 
Cela s’effectue au moyen d’un cordage nommé
l’écoute. Et fendre la mer avant qu’elle ne se referme sur elle-même avec vigueur.
La bordée désigne ainsi la durée d’une traversée.
Par extension, la bordée est l’équipage à la 
manœuvre pendant ce temps.
La bordée est enfin elle dans son lit d’écume des jours restants. »
 
La bordée – Eva Matesanz – Éditions L'Harmattan, Collection Écritures – Juin 2022.
 
En savoir plus, découvrir et feuilleter l'ouvrage : Éditions L'Harmattan.
 
Et un extrait lu par Eva : sur Youtube.