24
MAR 16

Trop rangé

Quand j'arrive chez ma psy, je pose toujours mon manteau par terre. Oui, à même le sol, comme ça au pied de son divan.

Et j'ai toujours fait ça parce qu'il n'y a pas de porte-manteau et alors je ne vois pas trop comment faire autrement. Et j'imagine que les autres font ça aussi (j'ai quand même un doute parce que ça fait vraiment bordélique). Mais de là où elle est, je crois pas que ma psy voit tout ce bordel. Même si, au moment où je me déshabille, elle est déjà assise et forcément elle me voit faire.

Me déshabiller, le bordel, et tout ça devant elle, ça paraît un peu connoté, ambigu tout ça, et je fais comme ça aussi quand je vais dormir, j'aime bien laisser tout traîner par terre, mais là c'est pas ça. Non, ça a plutôt à voir avec ma manière de faire quand j'étais enfant. Oui, mes frères et moi quand on était petits, on avait une chambre au dernier étage mais c'est comme s'il ne fallait pas nous habiller et nous déshabiller trop loin de la cuisine. C'était un peu le QG, la cuisine, le centre des opérations et il fallait rester à portée d'œil (je crois qu'on dit plutôt "à portée de vue").

21
MAR 16

Ce qui se manque

Alors voilà. Voilà un bout de la bande-son de la supervision à Paris 2, l'autre soir. 

Et un thème de cette séance-là  "Un peu comme une glace sans tainc'était sur ce qui se rate, ce qui se manque quand l'inconscient prend les commandes en coaching. Et ça arrive souvent ça, quoi qu'on dise quoi qu'on fasse, parce qu'il est toujours là l'inconscient. Il fait un bruit de fond et il ne rate jamais son coup.

Et c'est pour ça que c'est important, je trouve, une supervision d'inspiration analytique (enfin, une supervision où on peut tout simplement mélanger le passé et le présent, le perso et le pro, le qu'en-dira-t-on et le pulsionnel, comme dans la vie quoi… et alors démêler un peu tout ça). 

Donc, voilà un extrait sur ce thème. Et attention, ça peut choquer les âmes sensibles parce que c'est plein de contre-transfert et de transfert en direct. Et, en même temps, ça s'accroche et se dénoue, au contact et au fil du travail, dans l'intime en petit groupe et puis retour en plénière.

J'ai pris des nouvelles de l'étudiante, elle va bien et elle est d'accord pour que je partage. Et moi j'ai pris soin d'aller voir pourquoi j'ai encore eu besoin de lâcher un crapaud ce soir-là en séance.

 

17
MAR 16

Un peu comme une glace sans tain

À la fac du coaching, à Paris 2, il y a un étudiant qui enregistre les séances de supervision. Oui, il me demande si je suis d'accord et il pose son magnéto entre deux chaises, enfin sur la chaise entre lui et moi. Et ça m'a un peu gêné la première fois.

Comme il est dans le monde du cinéma (il joue dans des films policiers mais pas que, je crois), je me suis dit ça va faire genre "moi aussi, je fais mon cinéma, là" ou peut-être tout le contraire : si je me sens sur écoute, je risque d'essayer de me contrôler et avec les associations libres, sans censure ni morale donc, ça va pas le faire.

Mais j'ai décidé de laisser faire pour voir ce que ça pouvait faire d'autre, à la fois la première fois et les fois d'après. Je fais ça parce qu'aujourd'hui je n'ai plus trop besoin de faire mon mariole ni le coincé je crois.

Et donc avec le magnéto, pendant chaque séance, c'est comme s'il y avait une glace sans tain. Pour moi c'est comme ça, mais pour les étudiants je sais pas du tout et peut-être que la prochaine fois je leur proposerai un temps pour analyser ça (parce que même s'ils font ça avec les autres profs c'est quand même pas une raison).

 

10
MAR 16

Mon antisèche dans la poche

Le coaching c'est une promesse de progrès, genre : "se transformer", "changer", "se développer", "gagner en leadership" ou en "autonomie", etc, etc.
Mais revenir sur les bancs de l'école – enfin à l'université –, là, comme aujourd'hui, ça a un côté un peu "régressif" non ? Ça ramène en enfance mine de rien… Et c'est l'un des paradoxes de l'accompagnement : aimer revenir un instant et plus sur les chemins de son histoire intime pour changer vraiment, si affinités… (vraiment, parce que des fois malgré tout ce qu'on raconte y'a pas du tout d'affinités pour ça au fond).
Et moi, là, comme je le faisais parfois à l'école, j'ai une antisèche dans ma poche. Mais finalement je les utilisais pas du tout mes antisèches, j'en avais pas besoin parce que je les avais dans la tête mais ça me rassurait au fond…

C'est comme ça que j'ai commencé l'atelier de supervision pour le master coaching à Dauphine, ce mercredi. J'en ai parlé un peu ici de ce nouveau master, avec tout le topo de la ministre sur le coaching dans la fonction publique : EM CATOP.

Et c'était sur un fil ce mercredi, sur le fil des associations libres, avec mon antisèche, enfin mon fil d'Ariane dans la poche.
C'était exigeant, je trouve, cette première session. Mais c'était bien aussi. Et je pense que ça aura des effets au fond parce que, visiblement, c'était pas du tout dans le mainstream du coaching : « Mais, mélanger tout le passé et le présent, le tout personnel et le professionnel, tout ce que vous nous dites, tout ce que vous faites, là, c'est tout ce qu'on nous dit qui est interdit en coaching » a dit un étudiant tout à la fin du voyage.

A suivre donc…
 

01
MAR 16

Souvenirs d'école

« Mon hypothèse est que nous choisissonsplus ou moins consciemment, un métier et un environnement relationnel où nous répétons mine de rien une partie de notre histoire intime et familière. [] Et c'est souvent dans l'après-coup que surgit le sens profond de nos choix et que se révèle la trame de nos trajectoires professionnelles avec leurs intrications et leurs impasses parfois. Et ce sont ces répétitions, leurs sources et leurs effets que j'aime déplier avec ceux que j'accompagne aujourd'hui. »

Là, je dois répondre à un questionnaire de référencement coach ; oui, parce que dans cette entreprise-là j'accompagne sans papier ni tatouage depuis pas mal d'années déjà et aujourd'hui ça ne se fait plus ça. 
Alors, pour illustrer ma pratique, j'évoque comment les histoires professionnelles et personnelles se tricotent à mailles très serrées au fond ; pour moi et pour ceux que j'accompagne aussiEt là, il y a cette question sur mon passage par l'école des coachs : "Quelle valeur ajoutée de votre formation dans votre parcours ?

Et je me souviens de ce feuilleton-là sur un mode "glamour" d'abord, et puis après coup de ce qui se tramait aussi en coulisses.
Je ne sais pas pour vous mais c'est fou quand même toutes les histoires qu'on se raconte.

25
FéV 16

Irrésistiblement

Et au nom de quoi vous vous censurez, ici ?
C'est ma psy qui m'a demandé ça l'autre soir parce que je lui disais comment j'avais l'impression d'être coincé souvent, comme autocensuré dans ma vie. Avec aussi, depuis quelques jours, des symptômes physiques. Oui, je découvre que je ne respire qu'à moitié comme si j'étais en apnée souvent.
Et dans l'écriture aussi, je n'arrive pas à me lâcher vraiment. Et puis avec elle aussi sur le divan (enfin, moi sur le divan et elle derrière), je sens que je me coince. Mais sans trop savoir ce que je ne lâche pas puisque je ne sais pas ce que je ne lâche pas.

10
FéV 16

D'après une histoire vraie

J'avais tellement aimé Rien ne s'oppose à la nuit, cette autopsy par l'écriture des liens familiaux et d'une forme de fabrique de la folie, alors quand j'ai vu le nouvel opus de Delphine de Vigan, j'ai craqué.

Ce roman-là, D'après une histoire vraie, c'est comme un thriller psychologique ; impossible de le lâcher tellement la tension monte au fil des pages (presque 500 pages quand même ! jamais lu un livre aussi gros).
Mais, est-ce la suite de la saga familiale (Delphine reçoit des lettres de menace
) ou bien un délire privé (Delphine déprime, s'enferme) ? Est-ce pour de vrai ou une fiction ? Impossible de savoir. Et c'est ça aussi qui accroche et qui nous tient, comme une énigme et jusqu'à la fin.

Parce que c'est aussi une lubie de notre époque « cette fascination extrême de notre société pour le vrai, "vrai" à la télé, "vrai" au cinéma, "vrai" dans l’écriture" », dit la romancière dans ses interviews du moment mais en nous laissant avec l'énigme toujours.

Ce livre est inspiré de Misery, le roman-cauchemar de Stephen King, où un écrivain à succès se retrouve à la merci d'une infirmière qui adore son oeuvre… jusqu'à la folie.

Mais c'est aussi d'après une histoire vraie, celle de l'auteure, qui mêle à son récit des "personnages" de sa vie d'aujourd'hui : Louise et Paul, ses deux jumeaux qui quittent le nid maternel (elle a effectivement deux enfants mais c'est pas des jumeaux) ; François, son amoureux, qui est producteur et présentateur d'émissions littéraires et qui se demande aussi si Delphine délire (François Busnel, le critique littéraire, est son compagnon dans la "vraie" vie)

Alors jusqu'à la dernière page et même après, on ne sait pas, on ne sait plus, parce qu'on a beau vouloir démêler le vrai du faux, c'est toujours sur la même corde qu'on tire.

Et, là, quelques morceaux des pages que j'ai aimé corner.

07
FéV 16

T'es jeté

– Blacklisté ! Moi aussi maintenant je suis blacklisté.

Des fois, tu te mets à parler anglais sur le divan. Enfin tu places un mot ou une expression comme ça, dans une phrase, pour parler de toi : game over, buggé, short-cut, et cætera… (enfin pas et cætera, ça c'est du latin et c'est ton père qui parlait latin des fois). Et tu ne comprends pas pourquoi tu fais ça parce que t'es vraiment nul en anglais et c'est pas ta langue maternelle. Et ça te rappelle un peu tes années dans le conseil, avec plein de gimmicks et d'anglicismes, pour faire genre.
Blacklisté ! Tu répètes ce mot qui t'es venu et tu demandes à ta psy pourquoi tu fais ça des fois !? Tu sais bien qu'elle répond pas à ça parce qu'elle peut vraiment pas savoir pour toi. Mais là, t'insistes un instant juste pour qu'elle t'aide à trouver peut-être.

– Hein, mais pourquoi je fais ça des fois ? 

03
FéV 16

Des nouvelles de Lionel

J'ai aimé rencontrer Lionel Ancelet sur les bancs de l'école du coaching. C'était le début des années 2000. Et puis chacun a tracé sa route sur les chemins de l'accompagnement, Lionel du côté de ceux qui voulaient voir du pays ou changer de vie, enfin s'expatrier ou faire un bilan de compétences. 

Et il y a eu "Coacher avec ses démons", une année folle avec Eva, et c'est là que Lionel a aimé nous rejoindre ; l'instant d'un atelier. 

Et maintenant on chemine ensemble et en supervision, en groupe et à la campagne des fois. Et puis un jour, je ne sais plus trop comment, j'ai découvert que Lionel aimait beaucoup écrire aussi : des nouvelles et des micro-fictions, dans l'intimité et loin du coaching, alors j'ai eu envie de l'interviewer. Rencontre singulière donc. Et là, j'ai pas toujours tenu le fil de l'interview.

29
JAN 16

Le voleur n'existe pas

"Et maintenant, vous allez signer que le voleur n'existe pas."
Elle rigole ma psy quand elle m'entend dire ça. Là, je lui raconte un bout de l'histoire du Vélib' que l'autre jour j'avais attaché devant le Carrefour Market, boulevard Rochechouard, mais qu'un malfrat a volé en moins de deux minutes, le temps de faire une course. 

Je lui raconte ça pas pour la faire rigoler ni pour me plaindre (ça c'est déjà fait) mais parce que, sur le moment et puis après, j'ai fait genre "C'est pas grave" mais soudain c'est revenu sur le divan parce que dans mon histoire il y a pas mal d'histoires de toutes les couleurs ou tordues, insolubles ou absurdes et comme des énigmes (des histoires autour de l'argent, avec de la violence, et puis des liens importants et normalement affectueux, je trouve, mais coupés à jamais…).

"Et c'est difficile de trouver un peu d'ordre dans tout ça ?!", me dit ma psy. Oui, et donc je lui raconte qu'il me fallait porter plainte à la police comme m'avait dit la femme du call center, parce que sinon ça me coûterait la peau des fesses et je pourrais plus faire de Vélib' (je crois que je fais près de 1500 kilomètres par an pour aller sur le divan et retour).

27
JAN 16

Un Master Coaching à Dauphine aussi

« La création de l'EM CATOP de l'Université Paris-Dauphine est un projet expérimental ambitieux qui accompagne l'émergence d'une nouvelle filière de professionnels de l'accompagnement des dirigeants, des collectifs de travail et des organisations […] »

EM CATOP ça veut dire "Executive Master Coaching et Accompagnement de la Transformation des Organisations Publiques" et ça c'est un bout de l'intro du programme auquel je vais contribuer ; à ma manière.

Ce qui m'accroche ici c'est le côté "recherche-action et laboratoire" centré sur cette filière et cette forme-là du métier : des coachs du dedans, le secteur public, une pratique à créer, une forme de coaching institutionnel… (cf. vidéo de la "leçon inaugurale" de Maryline Lebranchu, à la fin de ce billet) ; centré aussi sur "les forces d'intervention et de transformation des organisations". Parce que les "forces d'intervention" ça augure d'emblée du "programme de défense" que ça va déclencher en face, enfin chez les agents coachés, en séance ou en coulisses.

19
JAN 16

C'est comme un rébus

Ça faisait pas mal de temps que t'avais très mal au ventre, surtout au beau milieu de tes nuits. Mais c'est très intime le ventre, alors c'est pas la peine de donner de détails ici.

Et tu t'es rappelé que t'avais un ostéopathe dans le temps. Tu l'appelais le "médecin chinois" pour ne pas dire "le sorcier" parce qu'il avait quand même des pratiques bizarres : il te plantait des aiguilles dans la peau, te papouillait le crâne, il te faisait des passes magiques et un dessin pour t'expliquer les liens entre tout et son contraire… Toi, au fond, tu croyais pas vraiment à toutes ses manips mais quand tu le consultais, pour tes insomnies parfois ou ton dos coincé, ça marchait plutôt bien.

Et puis c'était ta période coach un peu newage, alors tu te posais pas trop de questions (par exemple, sur le transfert que t'avais sur lui et sur l'effet placebo de tout ça). Mais comme son cabinet est rue du Cherche-midi, t'avais quand même fait un tweet genre "Cherche midi à quatorze heures avec le chaman". Et aujourd'hui, avec le projet de recherche "ERREUR 404" tu vois bien que c'était comme chercher quelque part des choses qui ne sont pas là où on les cherche (même si ça soulage un instant).

14
JAN 16

ERREUR 404

C'était ta première séance de la nouvelle année. Et alors, juste avant d'entrer, tu t'es soudain demandé s'il fallait lui souhaiter Bonne année. Toi, t'avais bien envie, mais comment faire alors ?! Parce qu'entre l'instant où elle t'ouvre sa porte et le moment où tu t'es allongé, tout va vraiment très vite ; oui, il s'écoule même pas trente ou quarante secondes. Alors tu te dis que ça ferait un peu ridicule de lui dire ça, vite fait, comme ça, quand t'es debout face à elle. Et ce serait encore plus ridicule de lui dire une fois sur le divan, sans la voir alors (parce que pour toi, les vœux, c'est pas juste se balancer des mots).

Tu t'es dit aussi que tu pourrais peut-être lui souhaiter à la fin de la séance ? Mais une fois qu'elle donne le top départ, genre "Là, c'est terminé." ou bien "Nous verrons ça la prochaine fois.", ça va encore plus vite que quand t'arrives.

Oui, c'est comme un signal rouge ces mots-là. Tu récupères ta musette au pied du divan, ton portefeuille dedans, tu retires l'argent de la séance, tu poses les billets sur sa petite table en chêne, tu reprends ton blouson, tes lunettes, ton écharpe, ta besace, et elle, elle attend un instant (et ça te stresse son regard sur toi, là, parce que t'es un peu cassé quand t'essaies de rassembler tes affaires), elle ouvre sa porte, on se dit "Au-revoir, À la prochaine fois" (enfin, "À la prochaine fois" c'est toi qui le dis parce que tu tiens à garder ce fil des séances) et puis tu files comme un voleur. Ou plutôt comme si tu voulais pas lui voler du temps.