26
AOU 16

Pensez à nous Roulez tout doux !

Sur l'établi de l'atelier de campagne et de l'été, Eva et moi on a aimé vous préparer un stage de "conduite de groupes". C'est pour faire alliance avec toutes les « passions dominantes » qui toujours se trament dans les coulisses de la vie d'un groupe : l'idéalisation ou l'attaque par exemple.

Bienvenus à vous alors, avec vos outils préférés pour animer, former ou créer, et tellement propices aussi à ces jeux-là. 

24
AOU 16

Je vais faire un détour

Ce matin-là, tu as choisi cette robe à fleurs qui est comme un tableau de Andy Warhol et qui, je ne sais pourquoi, me rend un peu fou à chaque fois. Et c'est pour ça que je n'ai rien voulu savoir du dessous de tout ça. Tu avais aussi un pull jaune tournesol, très court, qui en rajoutait à l'été. Et des sandales avec deux ou trois lanières de cuir. C'est vraiment trop ces lanières, je me suis dit.
Et puis on est allé au marché dans la vieille Simca.
Sur le chemin, j'essayais de regarder les champs de tournesols plutôt que le bout de tes pieds ou la ligne de tes jambes. Ou tout l'inverse peut-être. Oui, parce que sinon ça me donnait envie de te lécher (le bout des pieds, je veux dire).
– Je vais faire un détour, je t'ai dit.
– …
– Par le magasin bio, pour ajouter une gousse de vanille dans le rhum arrangé à la mangue.
Toi, tu n'as rien dit parce tu aimes tellement te laisser emmener et bercer comme ça dans cette 
vieille voiture. 

13
AOU 16

Pas de chevalière ni d'alliance

Là, j'aime continuer d'écrire au fil de mes souvenirs, de mon histoire,
et après "Fais le beau, Attaque !", les années d'enfance,
c'est comme une nouvelle partie qui se déplie : "Le pouvoir du temps passé"…

Bien avant de mener mon enquête, j'avais revu ma tante Marie-Thérèse. C'était à La Réunion, j'avais vingt-quatre ans et j'étais parti découvrir l'île natale de mes parents. Mais pas du tout pour un voyage d'études sur mon histoire familiale. Non, parce qu'à cette époque, j'avais quitté la maison à Médan et je ne faisais plus d'anthropologie familiale comme dans mon enfance mais des études de sciences éco. Et je commençais à vivre avec B. (Ici, pour l'instant, plutôt qu'un pseudo ou son prénom en entier, B je l'appelle B parce que même si tout ça c'est mon autofiction avec mes fantasmes, c'est quand même très réel et je ne sais pas toujours comment on fait avec le réel. Dans la vie ou dans les livres).

Donc c'est avec B que j'aimais commencer à construire une vie que je voulais idéale, enfin sans anicroches et donc bien à l'écart des histoires passées. Oui, parce que B avait eu une enfance pas très joyeuse je trouve (témoin, très jeune et toute proche, de la maladie au long cours et puis, à son adolescence, de la mort aussi). Mais elle préférait mettre un couvercle sur tout ça, ne pas en parler, pour vivre l'instant présent et aller de l'avant. Aller de l'avant, c'était plutôt mon envie à moi, et un peu comme une fuite au fond. Mais on n'avait alors aucune idée du pouvoir du temps passé. Sur le moment présent comme sur le futur.

06
AOU 16

Des psychanalystes en séance

La séance est ouverte… Rousseau, transfert, contre-transfert… Quand je vois passer ces mots-là l'autre jour sur mon fil Facebook, je clique sur le lien et c'est un article de Libé sur un nouvel ouvrage écrit par plein de psys. Chacun d'eux raconte un bout de séance ou d'une cure, en deux ou trois pages et avec un éclairage particulier, un concept à rebours des idées bien répandues : L'hypocondrie créative, La normopathie, L'anti-analysant,…

Ça se veut "à l'écart des modes et des polémiques" et c'est centré sur les déploiements contemporains de la psychanalyse. Et alors je me dis que j'aimerais bien le lire ce livre-là. Même si je ne lis pas trop les livres psys parce que pour l'instant je préfère les travaux pratiques à la théorie (oui, tout le travail d'enquête, d'archéologie intime sur le divan, enfin sur moi-même). Mais ce livre-là j'aime le commander à la librairie de la ville. Et quand il arrive quelques jours plus tard, je m'assois au bord de la fontaine, je le feuillette et c'est encore tout un régal qui s'annonce sur la table des matières : L'agonie primitive, La relation d'inconnu, La vivance, Les séparations imparfaites

Et alors sans attendre de tout lire (parce qu'il y a quand même cinquante-huit psys qui ont écrit), je partage là quelques extraits.
Oui, parce que c'est vraiment bien et ça parle tout autant de ce qui se passe derrière le divan (quand le psy patauge par exemple) que des patients qui fréquentent le divan 
aujourd'hui : les « états limites » bien plus « borderline » que les névrosés des temps fondateurs. Et avec ces patients-là « la logique du trauma, le recours à l'agir, la compulsion à répéter s'avèrent plus marqués que dans les cures de naguère, censément rythmées par les aventures de la parole et le principe de plaisir » (je crois bien que je suis un peu ou beaucoup comme ça et aussi de plus en plus aussi ceux que j'accompagne).

En partage quelques extraits donc.

01
AOU 16

Mais qui a commencé ?

Au fond, après mes années lycée, ce n'est pas du tout l'oubli qui m'a fait mettre à distance les femmes à la peau caramel et aux cheveux très noirs. Non, c'est plutôt la peur de ce genre de femmes qui pourtant m'attiraient beaucoup pendant mon adolescence. Parce que, quand je me suis lancé dans ma vie, j'avais encore dans la tête une légende familiale qui racontait que ma mère – probablement initiée et téléguidée par sa famille – , avait utilisé un philtre magique, ou plutôt maléfique, pour envoûter mon père et le détourner de sa vocation (même si devenir fonctionnaire de Dieu n'était sans doute pas sa vocation).
Enfin c'est la sœur de mon père, ma tante Marie-Thérèse, qui évoquait cette histoire-là quand elle venait déjeuner le dimanche avec l'oncle Paul, le cousin jésuite. Elle disait que c'était une rumeur qui s'était répandue comme une traînée de poudre quand mes parents ont dû quitter leur île natale avec ma sœur encore bébé. Mais en racontant ça, ma tante aussi entretenait la légende, comme si elle y croyait dur comme fer. Ou peut-être qu'elle voulait démêler le vrai du faux ou bien, mine de rien, qu'elle avait pas digéré le fait que mes parents ont donné à ma sœur le prénom de Marie-Thérèse
 – comme elle donc – , alors que cet enfant-là était né du péché et d'un scandale.