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AVR 13

Sous les nuages

Lui qui a choisit le métier de la terre aime tant et tant caresser ses creux et ses courbes ; aux lisières et tout au fond, tout le jour et jusqu'à la lune, dans sa cage à moteur.

*

- Qu'imaginez-vous que je n'aimerais pas de vous ?
C'est la question qui me vient là et de je ne sais où. (Enfin si ! Je sais maintenant ; ça me vient de là-bas, sur le divan, quand je demande si je suis aimable ou haïssable.) Question un brin saugrenue ici mais tellement bien faite pour elle, là. Elle qui voudrait gagner à tous les coups, à chaque shopping ; ce rituel en peuple coach qui chaque fois la tend comme un ressort, qui la met encore et toujours à l'épreuve dans son désir d'être aimée. Blessure qu'elle connaît bien, en long en large, de jadis et de celui qu'elle aurait tant aimé qu'il l'aime.

*

- Déboussolé ! murmure-t-il, en se posant là, sous les nuages, ce matin. J'ai mal dormi la nuit dernière. Je me fais beaucoup et de plus en plus de mouron.
Harcèlement  inversé ou à l'endroit, génération Y livrée sans mode d'emploi, descente des syndicats sans crier gare… Il n'en peut plus d'avoir déjà tout essayé : prendre soin d'écouter chacun dans l'équipe, un instant et plus, sur les chemins de la vie : divorce, déprime passagère ou de longtemps, solitude, cancer ou mort annoncée pour bientôt…
Une autre de sa tribu, épinglée pour trop de performance, était là, hier, à sa place ; et celle-là a préféré rendre les clefs.
Et lui, là, maintenant, je crois bien qu'il a envie de pleurer.
- Ça vous évoque quoi tout ça ?
Silence d'un instant. Et puis il lâche :
- Le dernier braquage là-bas, dans la boutique au creux de la vallée ; un pistolet sur ma tempe.

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