07
JUI 09

Traverser l'impasse

« C'est étrange, j'ai envie de prendre soin de vous ! »
Mes mots la font sursauter. La phrase me surprend aussi. Je ne sais pas encore ce qui suscite cet élan. Elle remplit son verre de l'eau fraîche que j'ai apportée. Elle a des tâches de rousseur sur le nez et les joues. Sa frange bien droite souligne ses longs sourcils bruns et ses yeux verts. J'aimerais savoir peindre.
Elle semble attendre une suite à mes mots. Je questionne :
- Ça vous fait quoi quand je vous dis ça ?
- Je me dis que vous avez pris mon symptôme ! Elle sourit et ajoute : Je prends conscience que je plonge dans la plainte aujourd'hui.
- Et je me croyais allergique à ça !
 
30
JUN 09

Indépendant

« Je veux m'installer en indépendant. J'ai tout préparé pour quitter l'entreprise et créer mon cabinet. Mais je n'arrive pas à franchir le pas ! »
Il pose des mots sur son histoire : il est DRH et a déjà passé six ans dans cette entreprise. Aujourd'hui il s'y ennuie. Il est aussi l'auteur d'ouvrages sur les ressources humaines.
Il est là depuis quelques minutes. C'est la première séance. Il me dit qu'il a fréquenté le divan pendant plusieurs années. Quelque chose d'enveloppant et doux s'installe entre lui et moi. Et si je retenais un instant le fil qui se tisse et nous enveloppe doucement ? Suspendre ce fil pour le mettre en relief. Je lui demande : « Qu'attendez-vous de moi ? »
 
23
JUN 09

L'amie idéale

J'ai rencontré cette amie idéale pendant quelques instants. Âme sœur et confidente bienveillante d'un moment. C'était lors d'une séance avec ma psy !
Elle avait envie de découvrir avec moi une relation que je semble chercher en vain. Une relation où la femme ne serait ni l'archétype de la « bonne mère », ni l'épouse. Ni la thérapeute qui guérit des maux de l'âme, ni la muse qui m'inspire.
Et elle a pour cela choisi le jeu. Elle a d'abord beaucoup tâtonné. Elle est entré dans la peau de différentes figures féminines qu'elle sait importantes pour moi. Je devais lui donner la réplique, mais les mots sonnaient faux.
 
29
MAR 09

A la folie? Pas du tout ?

Il parait que, sur le chemin de la vie, la dynamique de la femme est d'aller de l'intériorité vers le monde. Et que les hommes vivent plutôt l'expérience inverse : ils cheminent du "grand monde" vers l'intime, vers l'essence de l'être.
C'est ce mouvement que j'aime expérimenter à travers l'écriture.
Après Dans l'intimité du coaching, quelques lignes plus intimistes.

 

28
DéC 08

Une crypte romane

J'entends comme une fêlure dans sa voix. Un tremblement, dès ses premiers mots. Il me dit qu'il a demandé à son psy « d'arrêter l'introspection, les plongées dans son passé ». Et qu'il a entrepris un coaching pour « booster son action commerciale ».
Notre travail a commencé il y a six mois et je prends conscience que nous allons et venons entre ces deux champs : d'un côté son histoire personnelle, ses secrets douloureux ; et, de l'autre côté, son désir de se développer dans son métier de coach. Allées et venues entre passé et futur, blessures et projets, fragilité et désir d'indépendance. Se dessine ici un entre-deux indéfini, mouvant. Un espace grand ouvert qui l'expose à lui-même, qui m'expose aussi.
Il lâche soudain :
- Arrêter de vivre serait une solution.
La fêlure dans sa voix devient cassure. Mon estomac se noue. Je n'ai ni l'envie ni le savoir pour aller dans le monde de Tanatos. Il a demandé à son psy des anti-dépresseurs pour « éviter de passer à l'acte » et ajoute :
- J'aimerais que la solution s'impose d'elle-même, que la vie s'arrête. Là aussi, voyez-vous, je reste en position d'objet plutôt que sujet !

09
DéC 08

Marcher en forêt

- Autour de Paris, vous avez Rambouillet, Fontainebleau, Compiègne...
- Rambouillet me rappellera ces longues marches avec mes enfants. Mais aussi avec leur père. Mon ex-époux ! C'est prendre le risque de replonger dans mon passé. De cultiver ma nostalgie. Alors que vous m'invitez à vivre au présent !

L'instant d'avant, Ema m'a parlé de son plaisir de marcher seule « dans le silence de la forêt, loin de Paris, mais c'était il y a longtemps ». Alors je l'ai invité à revivre cette expérience au présent, d'ici notre prochaine séance. Mais ma proposition tombe à plat !
- Ema, vous savez, vous aimez vivre avec votre passé. Vous avez quitté votre mari depuis plusieurs années et il est présent partout avec vous.
- Oui, alors Fontainebleau ou Compiègne ce sera pareil !
- Comment est-il présent ici aussi ?
- Non, il n'est pas vraiment là ! Philippe est juste une évocation, une image qui s'éloigne maintenant.
- Quelle est votre sensation quand vous évoquez son image qui s'éloigne ?
Long silence. Ema me regarde dans les yeux. C'est la première fois. J'ignore la couleur de ses yeux. Elle détourne son regard.

24
NOV 08

De la complicité avec soi

Il arrive à l'heure d'habitude et aujourd'hui, il sonne avec dix minutes de retard. J'ouvre la porte et je vois qu'il a couru. Il a le souffle court. Sa chemise blanche est froissée sous son costume bleu marine impeccable.
Son bureau est à quelques stations de métro et il préfère venir à pied. Il m'annonce : « Je crois que j'ai battu mon record aujourd'hui ! ».

Il m'explique qu'il n'a pas réussi à maîtriser sa réunion, juste avant…
Je l'entends sans vraiment écouter et l'invite à prendre le temps d'arriver. Des gouttes de sueur perlent sur son front jusqu'aux sourcils. Il tente de s'essuyer avec ses doigts, ses mains. Je lui tends la boite de kleenex. Il retire sa veste, se pose enfin. Regards. Long silence après l'agitation.

Charles est directeur du contrôle de gestion dans une entreprise leader dans les télécoms. Régulièrement sollicité par des chasseurs de tête, il change d'entreprise tous les deux ou trois ans. Il pratique aussi des sports de l'extrême. Comme s'il courrait après lui-même ?
Mais aujourd'hui, devant une nouvelle offre séduisante, il hésite : « Pourquoi partir encore ? Pourquoi cette boulimie du changement ? »
C'est sa demande pour ce coaching. Comment l'accompagner dans ce questionnement ? Est-ce vraiment le champ du coaching ?

09
NOV 08

Coincés

Je marche en forêt, loin du bruit du monde. L'esprit libre. Presque libre. Une partie de moi s'éveille et s'agite en sourdine. Le week end se termine et je pense soudain à mon premier rendez-vous demain matin : une supervision avec Agathe. Pour la première fois, depuis longtemps, l'appréhension monte quelques heures avant une séance. Mais pourquoi cette inquiétude ?

Agathe s'est installée en indépendante depuis deux ans. La jeune femme m'a sollicité pour « enrichir ses pratiques et affirmer son identité de coach. »

La séance d'avant, il y a un mois, Agathe n'avait pas de demande. Alors, j'ai travaillé avec ce qui était là, sous notre nez : notre relation.
Derrière sa peur de l'imposture, Agathe a besoin de reconnaissance. Un besoin qui semble insatiable et que j'ai confronté : « Comment recevoir des autres ce que vous-même ne vous donnez pas ? ». Nous avons tourné en rond, longtemps. Nous avons cherché « l'air de famille » avec une autre histoire peut-être familière, ailleurs et autrefois. Le besoin du regard du père...
Mon inquiétude fait maintenant place à un malaise : Quel a été l'effet de cette séance pour Agathe ? Qu'apportera-t-elle demain ? Comme si j'avais pris son symptôme : la peur d'être disqualifié, le besoin d'être reconnu !
Je me souviens soudain du cas qu'elle avait apporté la première fois : un client qui la faisait « tourner en bourrique », tantôt disqualifiant, tantôt dans une belle énergie de création avec elle. Nous avions pointé ici une relation parfois « sadomaso ». Et aussi ses résonances, son plaisir jusqu'alors informulé, dans l'une ou l'autre position.
C'est peut-être ce jeu qui s'installe maintenant entre nous. Je me souviens aussi de séances annulées à la dernière minute. Agathe m'a alors appris à facturer toute séance annulée !
Je décide de laisser ici cette Agathe imaginaire ; mes projections et mon ego nourrissent une mémoire ancienne : le jeu de la compétition, les rapports de domination.

19
OCT 08

Brutal ? Part 2

Vous avez peut-être déjà lu le récit de la première séance avec Nicolas : ce pro de la conduite de grands projets que sa direction jugeait « trop brutal dans ses méthodes, trop violent dans ses relations ».
Nicolas voulait apprendre avec moi à « arrondir les angles ». Mais j'ai eu peur de lui la première fois : il me faisait penser à un ours et je me sentais bien petit devant lui !
C'est au détour d'une question, quand j'ai craqué, que j'ai aussi découvert sa fragilité.

Le coaching s'est poursuivi entre rebondissement, complicité et confrontation.
Voici la suite de l'histoire.

30
MAI 08

Confiance en soi

« Je ne sais pas quelle note lui donner ? Elle n'a pas confiance en elle ! »

Marie-Anne est DRH et accompagne un étudiant dans le cadre d'un tutorat Entreprise-Université. Elle doit clore ce parcours par une évaluation. Nous sommes en séminaire et c'est l'heure de la pause. Elle m'a pris à part, pour un "conseil de coach" !

Elle poursuit :
- Cette jeune femme n'a pas confiance en elle ! Et la note risque de la déstabiliser ?
- Marie-Anne, si pendant un instant, un instant seulement, vous aviez confiance en… confiance en elle…
- Oui ! Et alors ?
- Alors quelle note lui donneriez-vous ?
- J'aimerais une note qui l'encourage !
- Et quelle est cette note ?
- Je ne sais pas trop ? Une note pour l'encourager ne serait pas la réalité !

17
MAI 08

Brutal ? Part 1

J'ai eu peur de lui la première fois.
Je me souviens de son entrée. Imposant, il occupe toute l'embrasure de la porte. Je l'accueille et lui tends la main. Il me toise du haut de ses deux mètres. Il hésite, comme s'il cherchait quelqu'un d'autre. Il entre et s'installe. Le fauteuil me semble trop étroit pour lui.
Il se présente en quelques mots : la quarantaine, autodidacte et "pro" de la conduite de grands projets. Il y a six mois, son DG lui a confié la direction d'une équipe d'experts.
Puis il pose son objectif : il doit "professionnaliser cette équipe aux pratiques trop artisanales". Mais aujourd'hui la direction le juge "trop brutal dans ses méthodes, trop violent dans ses relations". Alors il veut "apprendre à arrondir les angles"


Oui, il y avait une forme de brutalité dans ses jugements, dans sa manière d'être avec moi, ou plutôt sans moi. Il m'a fait penser à un ours. Je me suis senti petit devant lui, inquiet aussi. Comment travailler la brutalité, la violence en coaching ?

16
AVR 08

Créer

« Pour moi, c'est comme si notre relation était asexuée… »
Eva pose ces mots quelques minutes à peine après le début de la séance. Je reste sidéré, sans voix, pendant plusieurs secondes…
Je pose mon regard sur son visage, ses yeux couleur noisette. Ses rides naissantes tout autour qui dessinent un sourire, comme à son insu. Nous avons sans doute le même âge. Elle porte un pull noir, soyeux, qui découvre le creux de son épaule… Je me demande ce que je ressens devant cette femme. Tendresse ou affection… Un sentiment qui prend sa source dans les confidences de notre première séance, un secret douloureux, une blessure dans la chair et l'âme…

27
FéV 08

Etre l'amie du coach ?

Vous avez peut-être lu l'histoire de Maud, cette directrice de projet, fusionnelle et troublante qui séduisait son coach ?
Lire : Fusion et dé-fusion
J'ai retrouvé Maud cette semaine pour notre dernière séance.
Dès les premiers instants, j'ai senti que quelque chose avait changé. Mais quoi ?