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MAR 16

Pas de feedback ni de selfie

Votre plus grande réussite en coaching ? ❞ Je réponds à un dossier de référencement coach, là, et je tombe sur ça. C'est fou, je trouve, cette question-là. Alors j'imagine un instant un QCM :

Votre plus grande réussite en coaching c'est quand :
a. Votre client ne vous demande plus de feedback ni de selfie (oui, genre test ou profil de personnalité).
b. Il découvre que les "atomes crochus" c'est juste une image, pas une formule chimique de l'attachement.
c. Il commence à vraiment vous détester.
d. Il arrête de croire au Père Noël (ou de vous parler de sa mère).
e. Un beau matin, il ne revient pas.
f. Il recommence à vous parler de sa mère.
g. Autre.

Et puis, une fois moins énervé, j'essaie de répondre à la question posée (et c'est bizarre ce besoin de faire mon malin avant de répondre ; c'est infantile sans doute), parce que c'est vrai qu'en coaching il y a des résultats "attendus", des "indicateurs de réussite" 

Le désir de réussite du coach est plutôt suspect, je trouve. Oui, parce qu'il renvoie alors à un besoin narcissique ou un fantasme de puissance face à l'insoluble et l'indécidable, ou encore, et "incidemment" alors, à la répétition d'une histoire familière.

Par exemple, au début de ma pratique, j'aimais être sollicité et intervenir au cœur des crises et des conflits pour tenter de les résoudre (ce que je n'avais pas du tout réussi dans ma famille). Et, en ma présence, avec des approches et des protocoles a priori éprouvés (CNV, gestalt), ça semblait s'apaiser bon an mal an, "réussir" un instant. Mais une fois parti, ça repartait de plus belle, sous d'autres formes, ça se déplaçait sur d'autres enjeux.

Aujourd'hui, je suis moins "accro" à ces situations et mon travail est d'une autre nature : en "réflexivité" avec ceux que j'accompagne, sur la dynamique intime du conflit, ses sources profondes pour chacun. En particulier chez XAYBZ où les managers sont tous formés à la Communication Non Violente et experts de ça, mais restent confrontés aux conflits et à une forme d'agressivité intérieure et originelle. C'est l'un des objets du coaching alors.

Certes, il y a des objectifs et des indicateurs de "réussite" posés au démarrage et en tripartite mais c'est le cheminement intime de chaque client, et non le mien, qui est à l'œuvre dans ces réalisations. Mon apport est de créer un temps d'analyse pour tenter de détricoter ce qui s'entremêle des histoires personnelle et professionnelle, du passé et du présent, des conflits du dedans et du dehors ; comme un travail biographique et de mémoire alors.

Et la "réussite" alors – mon exigence plutôt – c'est de prendre soin d'analyser, sur le divan, ce que je rejoue moi aussi dans les accompagnements les plus complexes ; complexes parce que je suis pris alors dans mes projections, une forme d'identification, des jeux de transfert singuliers.

***

Photo : Un endroit oublié. J'aime bien ces endroits-là, ça invite à imaginer comment c'était aux origines. A deux pas de l'Atelier des Jardiniers.