03
AVR 19

Une soirée particulière

Il y avait une soirée jeudi dernier pour en finir avec le coaching. Cette idée d'en finir, c'est l'ouvrage collectif écrit par les 23 étudiants du master coaching à Paris II après leur année universitaire 2015-16 : Pour en finir avec le coaching ? Tel qu'on le pratique aujourd'huiL'ouvrage est paru chez L'Harmattan en décembre et les auteurs organisaient une soirée de lancement chez l'éditeur.

Et il y avait une table ronde à laquelle j'étais invité, avec Thierry Chavel, le directeur du master. Moi, pour savoir à quoi m'attendre et ne pas trop dérailler, j'avais demandé les questions un peu avant.
Mes notes ici en partage.

21
FéV 19

Avec un magnétiseur ou un chaman

Un des rituels du coaching d'entreprise, c'est la réunion tripartite. Au début du parcours, pour les objectifs, le contrat, et puis tout à la fin pour faire le bilan, donner du feedback, évaluer… Et c'est essentiel, je trouve, de questionner ce rituel-là : Quelle place je prends dans ces réunions-triangle ? À quelle place me fantasme le client ? Et pour quoi je donne du feedback ? Et si ce n'était que mes projections tout ça ? … ?

Quelques lignes ici sur la fin du coaching de Sylvia, la femme qui avait peur d'avoir le syndrome de Stockholm et puis le besoin d'un bébé.
 

08
FéV 19

L'envie d'un bébé

Vous vous demandez peut-être ce qu'a fait Sylvia finalement après le « casting » ? Oui, la femme qui avait peur d'avoir le syndrome de Stockholm, enfin d'être amoureuse du boss qui la sadisait plus ou moins. Et bien, finalement, elle a décidé que je l'accompagne. Je ne sais pas trop pourquoi, c'était l'époque où je ne cherchais plus à décortiquer les jeux de transfert. À trop vouloir faire ça, je voyais bien que ces jeux-là se figeaient. Et donc on a commencé. Une, deux, trois séances. La question du harcèlement est restée présente un bon moment mais elle en cachait une autre, inattendue. Ou peut-être sous une autre forme. Plus intime...

29
JAN 19

Syndrome de Stockholm ?

Donc, vous avez vu, j'ouvre un cycle d'ateliers sur les us et coutumes du coaching : shopping, préliminaires, contrat, réunions tripartites… tous ces rituels institués, pratiqués comme des évidences, mais pas vraiment questionnés. Et à haute tension pourtant.
Ça commence le jeudi 21 février, à l'Atelier, et ce sera sur les questions au cœur du casting. Oui, ce moment où le client choisit « son » coach : qu'est-ce qui nous encombre et qui est agissant ici ? Quel cadre poser ? Comment être à l'écoute de son désir d'accompagner ? Mais pas à tout prix ? … ?

Et pour ça, j'ai un peu plongé dans mes souvenirs et j'ai retrouvé cette histoire-là, autour de la question du 
« syndrome de Stockholm »Première rencontre donc, mais comme une séance pour moi. 

13
AVR 16

Sur le fil du rasoir

– L'autre jour, entre deux séances, j'ai eu une pensée un peu bizarre, un peu loufoque.

C'est à ma psy que je suis en train de dire ça et je ne sais pas du tout comment j'en suis arrivé là parce que c'est absolument décousu ce soir. Mais je continue comme ça.

– Oui, j'ai pensé un instant à ce que vous voyez de moi quand je suis allongé. Si parfois vous me regardez, alors au premier plan, enfin au plus proche de vous, vous devez voir ma tête et mes cheveux. Je ne crois pas que vous me regardiez mais j'ai perdu pas mal de cheveux sur le dessus. J'ai découvert ça quand je bricolais un dimanche parce qu'on ne peut pas se regarder soi-même par dessus. Oui, j'étais en train de poser des pavés dans le poulailler pour arrêter de marcher dans la boue de l'hiver quand je vais chercher les œufs. Et c'est là que Eva a pris deux ou trois clichés de moi, genre photo-reportage au jardin, au ras de la gadoue.

– Vous avez peur que je vois ce qui vous manque, me dit ma psy.

– Ah oui, peut-être ? Je ne voyais pas ça comme ça, mais pourquoi pas ! Et vous qui voyez du sexe un peu partout, je crois qu'un jour vous m'avez dit qu'il y a quelque chose comme ça aussi dans les cheveux, non ?

– … 
Elle ne répond pas à ma question.

21
MAR 16

Ce qui se manque

Alors voilà. Voilà un bout de la bande-son de la supervision à Paris 2, l'autre soir. 

Et un thème de cette séance-là  "Un peu comme une glace sans tainc'était sur ce qui se rate, ce qui se manque quand l'inconscient prend les commandes en coaching. Et ça arrive souvent ça, quoi qu'on dise quoi qu'on fasse, parce qu'il est toujours là l'inconscient. Il fait un bruit de fond et il ne rate jamais son coup.

Et c'est pour ça que c'est important, je trouve, une supervision d'inspiration analytique (enfin, une supervision où on peut tout simplement mélanger le passé et le présent, le perso et le pro, le qu'en-dira-t-on et le pulsionnel, comme dans la vie quoi… et alors démêler un peu tout ça). 

Donc, voilà un extrait sur ce thème. Et attention, ça peut choquer les âmes sensibles parce que c'est plein de contre-transfert et de transfert en direct. Et, en même temps, ça s'accroche et se dénoue, au contact et au fil du travail, dans l'intime en petit groupe et puis retour en plénière.

J'ai pris des nouvelles de l'étudiante, elle va bien et elle est d'accord pour que je partage. Et moi j'ai pris soin d'aller voir pourquoi j'ai encore eu besoin de lâcher un crapaud ce soir-là en séance.

 

01
MAR 16

Souvenirs d'école

« Mon hypothèse est que nous choisissonsplus ou moins consciemment, un métier et un environnement relationnel où nous répétons mine de rien une partie de notre histoire intime et familière. [] Et c'est souvent dans l'après-coup que surgit le sens profond de nos choix et que se révèle la trame de nos trajectoires professionnelles avec leurs intrications et leurs impasses parfois. Et ce sont ces répétitions, leurs sources et leurs effets que j'aime déplier avec ceux que j'accompagne aujourd'hui. »

Là, je dois répondre à un questionnaire de référencement coach ; oui, parce que dans cette entreprise-là j'accompagne sans papier ni tatouage depuis pas mal d'années déjà et aujourd'hui ça ne se fait plus ça. 
Alors, pour illustrer ma pratique, j'évoque comment les histoires professionnelles et personnelles se tricotent à mailles très serrées au fond ; pour moi et pour ceux que j'accompagne aussiEt là, il y a cette question sur mon passage par l'école des coachs : "Quelle valeur ajoutée de votre formation dans votre parcours ?

Et je me souviens de ce feuilleton-là sur un mode "glamour" d'abord, et puis après coup de ce qui se tramait aussi en coulisses.
Je ne sais pas pour vous mais c'est fou quand même toutes les histoires qu'on se raconte.

25
FéV 16

Irrésistiblement

Et au nom de quoi vous vous censurez, ici ?
C'est ma psy qui m'a demandé ça l'autre soir parce que je lui disais comment j'avais l'impression d'être coincé souvent, comme autocensuré dans ma vie. Avec aussi, depuis quelques jours, des symptômes physiques. Oui, je découvre que je ne respire qu'à moitié comme si j'étais en apnée souvent.
Et dans l'écriture aussi, je n'arrive pas à me lâcher vraiment. Et puis avec elle aussi sur le divan (enfin, moi sur le divan et elle derrière), je sens que je me coince. Mais sans trop savoir ce que je ne lâche pas puisque je ne sais pas ce que je ne lâche pas.

06
JAN 16

Le goût du lait

La première fois qu'il est venu ici, il m'a demandé si j'avais un peu de lait. Oui, c'était pour ajouter un nuage à son café. Ajouter un nuage, c'est joli. Mais lui, il parlait du gris de ses jours gris. Et avoir du lait, ou pas, c'est tout un monde aussi, je trouve. Et moi d'habitude, je n'ai pas de lait mais ce matin-là, j'avais un pot de crème et il a dit "Oui, ça m'ira bien". Comme c'était la première fois, je n'ai pas demandé ce que ça évoquait pour lui d'avoir du lait. Ici ou autrefois.
Et la semaine d'après, j'ai acheté une petite bouteille de lait entier. Et il a aimé ajouter un nuage, comme ça, dans son café du matin. Les fois d'après aussi. Et il parlait toujours du gris de ses jours et de comment il était grognon au fond. Moi, je lui disais "Plutôt boudeur, non ?", parce que ça semblait être sa manière d'être avec l'autre, depuis si longtemps.
Et puis un matin et les fois d'après aussi, il n'a plus du tout pris de lait.
J'ai insisté un instant, par habitude déjà, ou comme le ferait peut-être une maman ou une nounou, mais lui il a fait la moue, il a fait non de la tête.

04
JAN 16

Tout le sale et tout le rayé

"Demain, je n'aurai plus de bureau et je serai coincé entre la femme gnangnan et l'homme qui pue."
Il te dit ça d'un air "grognon" (c'est son mot pour décrire son humeur depuis quelques jours). Et tu peux comprendre, – enfin tu imagines –, parce qu'un grand chambardement se prépare dans sa boîte pour le début de l'été. Oui, tout le monde devra déménager dans un open space et lui sera traité comme tous les autres, au milieu des autres, même si c'est un boss.

La gnangnan, le grognon et l'homme qui pue, c'est comme les personnages d'un conte pour enfants, alors tu lui demandes comment c'était quand il était petit ? au niveau promiscuité, tu précises.
Non, pas de communs, il te répond. Il a toujours eu sa chambre à lui, bien à part, parce qu'il n'avait que des sœurs qui, elles, étaient ensemble et sous les toits. Euh, non pas du tout ! il a jamais eu envie de partager un peu de leur intimité.
Toi, tu évoquais ça un instant parce que tu te dis que les filles 
c'est pas comme un petit d'homme, un jour ça coule, ça saigne. Alors tu oublies ça et tu l'écoutes parler de l'open space et il s'imagine pas du tout avec la femme gnangnan à côté de lui. Elle est peut-être comme sa mère cette femme-là, mais on s'occupera d'elle la prochaine fois s'il la ramène (c'est la secrétaire de son boss) parce que pour l'instant il revient à l'homme qui pue. Et ce sera vraiment insupportable. Alors il veut quitter cette boîte.

27
DéC 15

Pas trop de moi

C'était dans le bus, sur le chemin du retour de l'école. Il me coinçait au fond du car, me collait la tête contre la vitre et il me torturait pendant tout le trajet. J'étais en sixième, je devais avoir onze-douze ans alors. Il était plus grand que moi ce gars-là mais c'est pas à cause de ça qu'il s'acharnait sur moi ; c'est parce que j'étais bon élève ! Il était pas dans ma classe mais tous les élèves savaient que j'étais comme ça. Mais moi, si j'étais bon à l'école c'était pas pour me la péter, c'est parce que l'école c'était un refuge.

Il raconte ce souvenir-là parce que l'instant d'avant il me parlait d'un big boss de sa boîte, le Hapiness Chief Officer, un "fou furieux" qui se déchaîne contre chacun en réunion. Alors lui, chaque fois que ce directeur-là fait ça, il a envie de lui "péter la gueule". C'est vrai que c'est plutôt bizarre pour un spécialiste des ressources humaines (un peu comme un coiffeur devenu chauve), mais moi, quand on me raconte des histoires bien chargées comme ça, j'en reste pas là, pas sur la scène professionnelle. C'est pas pour éviter la charge émotionnelle mais parce que j'imagine que ça se mélange avec plein d'autres histoires personnelles, que ça vient de plus loin. Alors j'invite l'autre à faire un pas de côté sur le fil du temps, genre "Ça vous évoque quoi ?" (Je fais ça surtout au début parce qu'au bout d'un moment ça se fait naturellement, enfin en présence. Et aujourd'hui c'est la première séance pour lui). Donc, avec cette question-là et un peu de silence, il s'est souvenu de cette histoire avec le garçon cruel.

– Ça a duré plusieurs mois, il continue. Et, un jour, je l'ai retrouvé ce gars-là. C'était plusieurs années après, j'avais dix-huit ou dix-neuf ans. Il était avec une des filles du pharmacien de la ville, il sortait avec elle ; en amoureux, je veux dire. Et moi je m'étais toujours dit que je lui péterais la gueule le jour où je le reverrais, mais je l'ai pas fait finalement. Je sais pas trop pourquoi ?

19
NOV 15

Encore allongé

 Je vais prendre quelques jours de vacances pour aller avec Eva au soleil, c'est son anniversaire, et alors je ne serai pas là pour la séance de jeudi soir, mais je vous paierai bien sûr puisque c'est la règle, même si c'est abusif, je trouve.

J'ai dit ça comme ça, d'un trait, un peu avant la fin de la séance. Mais cette fois-ci j'ai choisi de lui dire ça encore allongé parce que la dernière fois, je voulais aller à une conférence qui tombait pile poil aussi à l'heure du divan et je lui avais lancé ça debout en partant, face à elle et sur le seuil (cet entre-deux, entre le divan et sa porte, elle dit que c'est un "espace transitionnel" et moi ça m'inquiète un peu cet espace-là parce que je perds mes repères alors). 

24
SEP 15

Plutôt nature

Quand elle est venue ici la première fois, elle disait que dans son école de coaching, il fallait qu'elle trouve quatre clients à coacher ; enfin, pas dans son école, mais dehors. Elle devait aussi trouver un superviseur et c'est pour ça qu'elle venait ici. (Je crois qu'elle devait en voir d'autres mais ça m'était égal à présent ces histoires de casting.)

– Combien vous allez les faire payer vos clients ?, je lui avais demandé tout à trac.

Ça m'avait échappé ça. Je crois que c'est parce qu'elle n'était pas habillée comme les coachs qui d'habitude vont à l'école des coachs : de satin ou de cuir, de couleurs ou de soie. Elle, elle était plutôt nature, je trouve.

– Heu !? Ils ne nous demandent pas ça à l'école, ils parlent pas de ça, elle avait dit.

J'avais trouvé ça bizarre pour une école de coachs (ce qui est bizarre aussi c'est que quand je veux écrire l'école des coachs, mon smartphone il veut écrire l'école des sorciers). Parce que même si c'était pas une école privée son école, mais une université, ils font quand même payer tout le monde.